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Read books online » Fiction » L'île mystérieuse by Jules Verne (easy to read books for adults list TXT) 📖

Book online «L'île mystérieuse by Jules Verne (easy to read books for adults list TXT) 📖». Author Jules Verne



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son maître.

«Oui, Top ira! dit le reporter, qui avait compris l'ingénieur. Top passera où nous ne passerions pas! Il portera à Granite-House des nouvelles du corral, et il nous rapportera celles de Granite-House!

— Vite! répondit Cyrus Smith. Vite!»

Gédéon Spilett avait rapidement déchiré une page de son carnet, et il y écrivit ces lignes:

«Harbert blessé. Nous sommes au corral. Tiens-toi sur tes gardes. Ne quitte pas Granite-House. Les convicts ont-ils paru aux environs? réponse par Top.»

Ce billet laconique contenait tout ce que Nab devait apprendre et lui demandait en même temps tout ce que les colons avaient intérêt à savoir. Il fut plié et attaché au collier de Top, d'une façon très apparente.

«Top! Mon chien, dit alors l'ingénieur en caressant l'animal, Nab, Top! Nab! Va! Va!»

Top bondit à ces paroles. Il comprenait, il devinait ce qu'on exigeait de lui. La route du corral lui était familière. En moins d'une demi-heure, il pouvait l'avoir franchie, et il était permis d'espérer que là où ni Cyrus Smith ni le reporter n'auraient pu se hasarder sans danger, Top, courant dans les herbes ou sous la lisière du bois, passerait inaperçu.

L'ingénieur alla à la porte du corral, et il en repoussa un des battants.

«Nab! Top, Nab!» répéta encore une fois l'ingénieur, en étendant la main dans la direction de Granite-House.

Top s'élança au dehors et disparut presque aussitôt.

«Il arrivera! dit le reporter.

— Oui, et il reviendra, le fidèle animal!

— Quelle heure est-il? demanda Gédéon Spilett.

— Dix heures.

— Dans une heure il peut être ici. Nous guetterons son retour.»

La porte du corral fut refermée. L'ingénieur et le reporter rentrèrent dans la maison. Harbert était alors profondément assoupi. Pencroff maintenait ses compresses dans un état permanent d'humidité.

Gédéon Spilett, voyant qu'il n'y avait rien à faire en ce moment, s'occupa de préparer quelque nourriture, tout en surveillant avec soin la partie de l'enceinte adossée au contrefort, par laquelle une agression pouvait se produire.

Les colons attendirent le retour de Top, non sans anxiété. Un peu avant onze heures, Cyrus Smith et le reporter, la carabine à la main, étaient derrière la porte, prêts à l'ouvrir au premier aboiement de leur chien. Ils ne doutaient pas que si Top avait pu arriver heureusement à Granite-House, Nab ne l'eût immédiatement renvoyé.

Ils étaient tous deux là, depuis dix minutes environ, quand une détonation retentit et fut aussitôt suivie d'aboiements répétés.

L'ingénieur ouvrit la porte, et, voyant encore un reste de fumée à cent pas dans le bois, il fit feu dans cette direction.

Presque aussitôt Top bondit dans le corral, dont la porte fut vivement refermée.

«Top, Top!» s'écria l'ingénieur, en prenant la bonne grosse tête du chien entre ses bras. Un billet était attaché à son cou, et Cyrus Smith lut ces mots, tracés de la grosse écriture de Nab:

«Point de pirates aux environs de Granite-House. Je ne bougerai pas. Pauvre M Harbert!»

CHAPITRE VIII

Ainsi, les convicts étaient toujours là, épiant le corral, et décidés à tuer les colons l'un après l'autre! Il n'y avait plus qu'à les traiter en bêtes féroces. Mais de grandes précautions devaient être prises, car ces misérables avaient, en ce moment, l'avantage de la situation, voyant et n'étant pas vus, pouvant surprendre par la brusquerie de leur attaque et ne pouvant être surpris.

Cyrus Smith s'arrangea donc de manière à vivre au corral, dont les approvisionnements, d'ailleurs, pouvaient suffire pendant un assez long temps. La maison d'Ayrton avait été pourvue de tout ce qui était nécessaire à la vie, et les convicts, effrayés par l'arrivée des colons, n'avaient pas eu le temps de la mettre au pillage. Il était probable, ainsi que le fit observer Gédéon Spilett, que les choses s'étaient passées comme suit: les six convicts, débarqués sur l'île, en avaient suivi le littoral sud, et, après avoir parcouru le double rivage de la presqu'île serpentine, n'étant point d'humeur à s'aventurer sous les bois du Far-West, ils avaient atteint l'embouchure de la rivière de la chute. Une fois à ce point, en remontant la rive droite du cours d'eau, ils étaient arrivés aux contreforts du mont Franklin, entre lesquels il était naturel qu'ils cherchassent quelque retraite, et ils n'avaient pu tarder à découvrir le corral, alors inhabité. Là, ils s'étaient vraisemblablement installés en attendant le moment de mettre à exécution leurs abominables projets.

L'arrivée d'Ayrton les avait surpris, mais ils étaient parvenus à s'emparer du malheureux, et... la suite se devinait aisément!

Maintenant, les convicts — réduits à cinq, il est vrai, mais bien armés — rôdaient dans les bois, et s'y aventurer, c'était s'exposer à leurs coups, sans qu'il y eût possibilité ni de les parer, ni de les prévenir.

«Attendre! Il n'y a pas autre chose à faire! répétait Cyrus Smith. Lorsque Harbert sera guéri, nous pourrons organiser une battue générale de l'île et avoir raison de ces convicts. Ce sera l'objet de notre grande expédition, en même temps...

— Que la recherche de notre protecteur mystérieux, ajouta Gédéon Spilett, en achevant la phrase de l'ingénieur. Ah! Il faut avouer, mon cher Cyrus, que, cette fois, sa protection nous a fait défaut, et au moment même où elle nous eût été le plus nécessaire!

— Qui sait! répondit l'ingénieur.

— Que voulez-vous dire? demanda le reporter.

— Que nous ne sommes pas au bout de nos peines, mon cher Spilett, et que la puissante intervention aura peut-être encore l'occasion de s'exercer. Mais il ne s'agit pas de cela. La vie d'Harbert avant tout.»

C'était la plus douloureuse préoccupation des colons. Quelques jours se passèrent, et l'état du pauvre garçon n'avait heureusement pas empiré. Or, du temps gagné sur la maladie, c'était beaucoup. L'eau froide, toujours maintenue à la température convenable, avait absolument empêché l'inflammation des plaies. Il sembla même au reporter que cette eau, un peu sulfureuse, — ce qu'expliquait le voisinage du volcan, — avait une action plus directe sur la cicatrisation. La suppuration était beaucoup moins abondante, et, grâce aux soins incessants dont il était entouré, Harbert revenait à la vie, et sa fièvre tendait à baisser. Il était, d'ailleurs, soumis à une diète sévère, et, par conséquent, sa faiblesse était et devait être extrême; mais les tisanes ne lui manquaient pas, et le repos absolu lui faisait le plus grand bien.

Cyrus Smith, Gédéon Spilett et Pencroff étaient devenus très habiles à panser le jeune blessé. Tout le linge de l'habitation avait été sacrifié. Les plaies d'Harbert, recouvertes de compresses et de charpie, n'étaient serrées ni trop ni trop peu, de manière à provoquer leur cicatrisation sans déterminer de réaction inflammatoire. Le reporter apportait à ces pansements un soin extrême, sachant bien quelle en était l'importance, et répétant à ses compagnons ce que la plupart des médecins reconnaissent volontiers: c'est qu'il est plus rare peut-être de voir un pansement bien fait qu'une opération bien faite. Au bout de dix jours, le 22 novembre, Harbert allait sensiblement mieux. Il avait commencé à prendre quelque nourriture. Les couleurs revenaient à ses joues, et ses bons yeux souriaient à ses gardes-malades. Il causait un peu, malgré les efforts de Pencroff, qui, lui, parlait tout le temps pour l'empêcher de prendre la parole et racontait les histoires les plus invraisemblables.

Harbert l'avait interrogé au sujet d'Ayrton, qu'il était étonné de ne pas voir près de lui, pensant qu'il devait être au corral. Mais le marin, ne voulant point affliger Harbert, s'était contenté de répondre qu'Ayrton avait rejoint Nab, afin de défendre Granite-House.

«Hein! disait-il, ces pirates! Voilà des gentlemen qui n'ont plus droit à aucun égard! Et M Smith qui voulait les prendre par les sentiments! Je leur enverrai du sentiment, moi, mais en bon plomb de calibre!

— Et on ne les a pas revus? demanda Harbert.

— Non, mon enfant, répondit le marin, mais nous les retrouverons, et, quand vous serez guéri, nous verrons si ces lâches, qui frappent par derrière, oseront nous attaquer face à face!

— Je suis encore bien faible, mon pauvre Pencroff!

— Eh! Les forces reviendront peu à peu! Qu'est-ce qu'une balle à travers la poitrine? Une simple plaisanterie! J'en ai vu bien d'autres, et je ne m'en porte pas plus mal!»

Enfin, les choses paraissaient être pour le mieux, et, du moment qu'aucune complication ne survenait, la guérison d'Harbert pouvait être regardée comme assurée. Mais quelle eût été la situation des colons si son état se fût aggravé, si, par exemple, la balle lui fût restée dans le corps, si son bras ou sa jambe avaient dû être amputés!

«Non, dit plus d'une fois Gédéon Spilett, je n'ai jamais pensé à une telle éventualité sans frémir!

— Et cependant, s'il avait fallu agir, lui répondit un jour Cyrus Smith, vous n'auriez pas hésité?

— Non, Cyrus! dit Gédéon Spilett, mais que Dieu soit béni de nous avoir épargné cette complication!»

Ainsi que dans tant d'autres conjonctures, les colons avaient fait appel à cette logique du simple bon sens qui les avait tant de fois servis, et encore une fois, grâce à leurs connaissances générales, ils avaient réussi! Mais le moment ne viendrait-il pas où toute leur science serait mise en défaut? Ils étaient seuls sur cette île. Or, les hommes se complètent par l'état de société, ils sont nécessaires les uns aux autres. Cyrus Smith le savait bien, et quelquefois il se demandait si quelque circonstance ne se produirait pas, qu'ils seraient impuissants à surmonter!

Il lui semblait, d'ailleurs, que ses compagnons et lui, jusque-là si heureux, fussent entrés dans une période néfaste. Depuis plus de deux ans et demi qu'ils s'étaient échappés de Richmond, on peut dire que tout avait été à leur gré. L'île leur avait abondamment fourni minéraux, végétaux, animaux, et si la nature les avait constamment comblés, leur science avait su tirer parti de ce qu'elle leur offrait. Le bien-être matériel de la colonie était pour ainsi dire complet. De plus, en de certaines circonstances, une influence inexplicable leur était venue en aide!... mais tout cela ne pouvait avoir qu'un temps!

Bref, Cyrus Smith croyait s'apercevoir que la chance semblait tourner contre eux. En effet, le navire des convicts avait paru dans les eaux de l'île, et si ces pirates avaient été pour ainsi dire miraculeusement détruits, six d'entre eux, du moins, avaient échappé à la catastrophe. Ils avaient débarqué sur l'île, et les cinq qui survivaient y étaient à peu près insaisissables.

Ayrton avait été, sans aucun doute, massacré par ces misérables, qui possédaient des armes à feu, et, au premier emploi qu'ils en avaient fait, Harbert était tombé, frappé presque mortellement. Étaient-ce donc là les premiers coups que la fortune contraire adressait aux colons? Voilà ce que se demandait Cyrus Smith! Voilà ce qu'il répétait souvent au reporter, et il leur semblait aussi que cette intervention si étrange, mais si efficace, qui les avait tant servis jusqu'alors, leur faisait maintenant défaut. Cet être mystérieux, quel qu'il fût, dont ils ne pouvaient nier l'existence, avait-il donc abandonné l'île? Avait-il succombé à son tour?

À ces questions, aucune réponse n'était possible.

Mais qu'on ne s'imagine pas que Cyrus Smith et son compagnon, parce qu'ils causaient de ces choses, fussent gens à désespérer! Loin de là. Ils regardaient la situation en face, ils analysaient les chances, ils se préparaient à tout événement, ils se posaient fermes et droits devant l'avenir, et si l'adversité devait enfin les frapper, elle trouverait en eux des hommes préparés à la combattre.

CHAPITRE IX

La convalescence du jeune malade marchait régulièrement. Une seule chose était maintenant à désirer, c'était que son état permît de le ramener à Granite-House. Quelque bien aménagée et approvisionnée que fût l'habitation du corral, on ne pouvait y trouver le confortable de la saine demeure de granit. En outre, elle n'offrait pas la même sécurité, et ses hôtes, malgré leur surveillance, y étaient toujours sous la menace de quelque coup de feu des convicts. Là-bas, au contraire, au milieu de cet inexpugnable et inaccessible massif, ils n'auraient rien à redouter, et toute tentative contre leurs personnes devrait forcément échouer. Ils attendaient donc impatiemment le moment auquel Harbert pourrait être transporté sans danger pour sa blessure, et ils étaient décidés à opérer ce transport, bien que les communications à travers les bois du jacamar fussent très difficiles.

On était sans nouvelles de Nab, mais sans inquiétude à son égard. Le courageux nègre, bien retranché dans les profondeurs de Granite-House, ne se laisserait pas surprendre. Top ne lui avait pas été renvoyé, et il avait paru inutile d'exposer le fidèle chien à quelque coup de fusil qui eût privé les colons de leur plus utile auxiliaire.

On attendait donc, mais les colons avaient hâte d'être réunis à Granite-House. Il en coûtait à l'ingénieur de voir ses forces divisées, car c'était faire le jeu des pirates. Depuis la disparition d'Ayrton, ils n'étaient plus que quatre contre cinq, car Harbert ne pouvait compter encore, et ce n'était pas le moindre souci du brave enfant, qui comprenait bien les embarras dont il était la cause!

La question de savoir comment, dans les conditions actuelles, on agirait contre les convicts, fut traitée à fond dans la journée du 29 novembre entre Cyrus Smith, Gédéon Spilett et Pencroff, à un moment où Harbert, assoupi, ne pouvait les entendre.

«Mes amis, dit le reporter, après qu'il eut été question de Nab et de l'impossibilité de communiquer avec lui, je crois, comme vous, que se hasarder sur

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